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[#Rightscon2021] Table-ronde sur les enfants influenceurs

Prises de parole | 15 juin 2021

La 10e conférence annuelle RightsCon pour la défense des droits humains à l’ère numérique s’est déroulée en ligne du 7 au 11 juin.

À l’occasion de cet évènement international qui a rassemblé des acteurs de la tech, des responsables d’ONG, des chercheurs universitaires et des dirigeants politiques, j’ai été invité à participer à une table-ronde dédiée aux enfants influenceurs, intitulée « Cultural expression or commercial exploitation? The experience of digital kidfluencers is all of us’ business. »

Dans mon propos, j’ai évoqué les risques que génère l’extension de l’économie de l’influence aux enfants. La pratique des enfants influenceurs sur les réseaux sociaux brouille la frontière entre travail et loisirs et interroge les notions de consentement et de libre-arbitre des enfants dès lors qu’il s’agit d’une tâche récurrente et répétée. À l’initiative des comptes de leurs enfants, les parents se retrouvent rapidement en situation de conflit d’intérêt puisqu’ils bénéficient économiquement de l’image de ceux-ci. Les enfants ne sont pas préparés à cette célébrité soudaine qui fait courir sur eux des risques psycho-sociaux de court et de long terme dont leurs parents n’ont pas nécessairement conscience.

Au cours de notre échange, je suis également revenu sur les raisons qui m’ont poussé à déposer une proposition de loi sur les enfants influenceurs. L’idée d’encadrer cette pratique pour protéger les intérêts des enfants est née lorsqu’une mère de famille de ma circonscription m’a alerté sur l’ampleur de ce phénomène. Au même moment, la justice débouta l’association OPEN qui avait cherché à obtenir l’extension du statut des enfants du spectacle aux enfants influenceurs. Dès lors, il revenait au législateur de s’emparer du sujet.

J’ai enfin présenté plus en détails les différents aspects que couvre la loi sur les enfants influenceurs votée l’année dernière et entrée en application il y a quelques semaines, pour assurer le bien-être des enfants à court-terme (charge de travail, horaires, scolarisation) et garantir leurs intérêts à long-terme (mise en dépôt d’une partie des bénéfices). Pour protéger l’avenir des enfants, il m’a également semblé nécessaire d’établir un « droit à l’innocence numérique » qui se concrétise par un droit à l’oubli numérique. L’expérience française servira, je l’espère, d’exemple à travers le monde afin qu’Internet ne soit pas une zone de non-droit.

Cette table-ronde s’est révélée particulièrement intéressante dans la compréhension du phénomène des enfants influenceurs et de son ampleur. Les vidéos mettant en scène des enfants s’adressent avant tout à des enfants en brouillant très souvent la frontière entre contenu et publicité, alors même que les plus jeunes sont les moins à-même de distinguer ces deux registres. Il s’agit, j’en suis convaincu, d’un domaine dans lequel le législateur doit également intervenir pour garantir à nos enfants les mêmes protections face à la publicité sur Internet que dans les médias traditionnels.